20/11/2006

Tabac et alcool jettent les êtres humains dans la fange

Très étonnamment, on peut constater qu’en tous lieux, sauf peut être chez les eskimos, et de tout temps, jusqu’aux plus anciens témoignages de la vie passée, les être humains ont inventé tabac et alcool, issus de n’importe quelle plante, à croire que c’est un besoin. En Europe, fumer fut dès le début d’un dernier chic dans les plus hautes sphères de la société royale. On peut supposer que l’homme a toujours eu besoin de s’enfoncer dans la drogue, soit pour s’extraire de son quotidien, soit pour rejoindre les forces surnaturelles supposées.

Le mythe du bon sauvage proche de la nature et s’en satisfaisant en prend un coup, car on le voit en fait incapable de se suffire à sa vie censée être très saine, et demander à la drogue de le tirer vers une sorte de nirvana impossible à satisfaire de la sorte. En tout cas, ces quelques drogues ne faisaient sans doute pas encore les ravages actuels, étant moins bourrés de substances chimiques nocives. De toutes façons la vie était alors si brève et si pleine d’imprévus aptes à vous envoyer rapidement de vie à trépas, que l’effet de ces drogues n’avait pas le temps généralement d’opérer.

Tout au contraire, de nos jours les projections de décès au niveau mondial si la consommation de tabac ne diminue pas sont effrayantes : 150 millions de morts pour le premier quart du XXIe siècle, 300 millions pour le deuxième et plus de 500 millions pour les années 2050-2100. Le risque est énorme : le tabac tue un fumeur sur deux ; un quart des fumeurs meurent entre 35 et 69 ans, perdant de nombreuses années de vie ; l'arrêt du tabac a un effet positif, même à un âge intermédiaire.

En novembre 2003, la Cour de cassation a exclu, une responsabilité de principe des cigarettiers dans les maladies liées au tabac. Elle écarte ainsi la perspective d'une succession de procès à l'américaine. La plus haute juridiction française, a dédouané l'ex-Seita (aujourd'hui Altadis) dans le décès d'un fumeur du Loiret, Richard Gourlain, mort d'un double cancer de la gorge et de la langue en 1999, à l'âge de 50 ans. Sa famille réclamait 457 000 euros de dommages et intérêts, en soutenant que la Seita ne l'a pas informé du risque qu'il prenait et était coupable d'un défaut d'information.

Dans leur arrêt, les juges soulignent que le défunt était seul à pouvoir prendre des décisions qui s'imposaient et n’a jamais réduit sa consommation, ni après un décès dû à un cancer du poumon dans sa famille en 1980, ni après le diagnostic de son propre cancer en 1988.

La Cour a estimé que le danger de la cigarette tient à la fois aux produits qu'elle contient mais aussi au comportement du fumeur qui consomme excessivement ce produit, de sorte qu'on ne peut retenir par principe la responsabilité des fabricants. La veuve de M. Gourlain estime, elle, que pour certains fumeurs, la liberté d'arrêter n'existe plus. Exit le fait que les entreprises de production de tabac mettent dans leur cigarettes tout ce qu’il faut pour rendre dépendant à sa drogue le fumeur.

Plus intéressant, selon la Cour, malgré les demandes répétées du ministère de la santé publique, le ministère des finances n'a jamais voulu organiser des campagnes de prévention et imposer l'impression de messages d'avertissement sur les paquets de cigarettes. D'après des documents gouvernementaux versés au dossier, le ministère des finances justifiait cette réticence par le risque sérieux pour l'activité de la Seita et le rendement de la fiscalité sur le tabac. Qu’importe le nombre de morts et de souffrances, si l’économie fonctionnait bien. A la clé, les quelques milliers d’emploi valaient bien quelques dizaines de milliers de morts chaque année du fait du tabac !

La Cour cite également une lettre, datée du 18 décembre 1971, du ministre de l'économie de l'époque, Valéry Giscard d'Estaing, au ministre de la santé, qui, après avoir relativisé les risques dénoncés par son collègue, écarte l'éventualité de messages d'avertissement obligatoires sur les paquets de cigarettes. M Valéry Giscard d'Estaing fut nommé en décembre 2003 à l’académie des lettres. Quel dommage que le défunt M Gourlain n’ait pu vivre assez longtemps pour féliciter comme il se doit ce nouvel immortel… On constate encore une fois que les honneurs sont bien souvent réservés à ceux ne les méritant pas. Pour ne pas dire davantage.

En ce qui concerne l’alcool : 45.000 décès par an actuellement en France. Cinq fois tous les morts d’accidents de voiture. Pourtant, on en entend à peine parler : 16 % seulement des français le savent. Les jeunes ayant bu la nuit du week end multiplient par cinquante ( !) le risque d’être tué en voiture. Mais les piétons ne sont pas épargnés pour autant : 1/3 de ceux mourant sous les roues d’une voiture sont alcoolisés. En Suède, les récidivistes en la matière ont leur démarreur relié à un éthylomètre refusant de partir s’il s’avère positif. Gadget, puisqu’un comparse peut souffler à la place du conducteur. Mais de toutes façons, la tolérance zéro seule peut s’appliquer en la matière : pas un milligramme dans le sang. Et une peine très dissuasive pour tous ces assassins en puissance pris sur le fait.

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