17/11/2006

Droit à l’autodéfense : théorie et réalité

1 ) Agression verbale
Un inconnu vous agresse pour une raison ou pour une autre chez vous ou dans la rue, par exemple en vous insultant : vous portez plainte, vous avec non seulement la chance d’avoir des témoins, mais bien plus encore, mais là nous sommes déjà quasiment sur la planète mars, ces témoins veulent bien dire par écrit ou devant tribunal ce qu’ils ont vu et entendu, eh bien vous aurez fait tout ce travail pour rien, puisque dès que vous porterez plainte, le fonctionnaire de police ou de gendarmerie vous dira peut être qu’il y a deux heures de queue, mais plus sûrement encore qu’il inscrira votre plainte sur le registre de main courante, c’est à dire aux oubliettes.

A la rigueur cela servira si la personne provoque d’autres agressions pour dire, ce que tout le monde savait déjà, qu’il est agressif depuis longtemps. Si vous portez plainte avec constitution de partie civile, ce qui force la justice à faire théoriquement une enquête, le président du tribunal fera un classement sans suite dès qu’arrivera sur son bureau votre plainte, c’est à dire qu’il ne vous restera que vos yeux pour pleurer.

2 ) Agression physique
Si cette fois vous êtes victime d’une agression physique, ce qui a lieu en fait très souvent, soit que vous ayez eu l’inconscience de vouloir téléphoner avec le dernier téléphone portable dans un lieu public, ou que vous vous soyez fait insulter et ne vous soyez pas laissé faire, ou pour toute autre cause laissée à votre imagination ou expérience personnelle de la vie que vous possédez : vous vous battez. C’est bien, vous êtes courageux, et ne dédaignez pas de perdre quelques dents pour votre vie entière, ou de perdre un œil par exemple d’un bon coup de poing. Mais voilà, vous n’avez pas envie de perdre ni dent ni œil, et en plus vous savez vous battre, et c’est votre agresseur que vous envoyez au tapis. Tragique erreur ! Il vous a agressé comment, vous demandera le président du tribunal devant qui votre agresseur aura évidemment porté plainte, plainte qui cette fois ci n’aura pas été classée sans suite. C’est normal, vous êtes identifiable, et il y a coups et blessures.

Certes, si c’était vous à qui il manquait deux dents et un œil, votre agresseur ne serait pas resté, les bonnes gens ne seraient pas intervenus pour le ceinturer, et vous auriez alors seulement le recours de faire jouer votre assurance qui vous aurait donné le moins d’euros possibles, ou rien du tout si elle le peut juridiquement. Et si l’agresseur avait pu être mis en prison, il aurait à 99 % été insolvable, ou aurait rapidement déménagé sans laisser d’adresse, une fois mis en liberté dite surveillée, ou aurait fait quelques mois de prison au maximum, pour en ressortir plus terrorisant encore, pour aller ôter quelques dents à d’autres quidams, ou pire.

Mais n’importe, vous voici face au tribunal, et son président vous demande comment l’individu vous a agressé ?
ben c’est simple, il m’a arraché mon téléphone portable, lui direz-vous par exemple.
Vous a t-il donné des coups pour cela ?
Non, lui répondrez vous.
Et le président vous donnera tort, car vous ne deviez faire que le ceinturer. Certes, c’est difficile à ceinturer un voleur, car voyez-vous, on ne sait pas trop pourquoi, mais en général il ne se laisse pas faire, se démène, et donne à l’occasion quelques mauvais coups.

Mais voilà, vous n’aviez pas à frapper, mais deviez répondre à l’agression en proportion de l’attaque, et êtes donc condamné à réparation, c’est à dire à verser une indemnité à l’agresseur, non remboursable par votre assurance en général, qui peut se chiffrer fortement, et aux dépens (frais occasionnés par le procès). Si vous avez de la chance, et qu’il est encore en état de marche, vous aurez tout de même récupéré votre portable.
Vous pensez que ce récit relève de la pure hérésie ? Alors vous êtes fort mal renseigné sur les mœurs de la société dans laquelle vous êtes. En pratique, vous devez attendre d’être frappé avant de frapper, de recevoir un coup de couteau avant d’en donner (mais vous n’avez pas le droit d’en porter), et ainsi de suite.

Dans le meilleur des cas, vous sortirez blanchi du procès qui vous aura donné raison. Souhaitons alors pour vous que vous n’ayez pas affaire à la famille et aux amis de l’agresseur, qui trouve décidément que la justice est très mal rendue dans ce pays, si on ne peut plus agresser sans y perdre des dents. Dans le pire des cas, vous aurez non seulement perdu votre procès, votre portable, une ou deux dents, devrez payer des indemnités assez forte à votre agresseur qui n’en est pas à son coup d’essai, mais encore vous aurez affaire à la sortie du tribunal à la famille et aux amis, qui ne trouveront pas cette sentence suffisante, ou/et aurez vos biens : boite aux lettres, voiture, appartement, cage d’escalier abîmés, et vos enfants menacés ou davantage. Vous aurez la ressource de déménager en perdant toutes vos habitudes, la vie douillette que vous aurez mis des dizaines d’années parfois à vous forger dans votre quartier, voire retirerez votre plainte avant qu’elle n’aboutisse devant le tribunal, si tout ceci s’est produit avant, découragé par les menaces et voies de fait. Ce qui permettra à votre agresseur de continuer sa belle vie d’impunité et d’agressions.

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