16/11/2006

sang contaminé : ni responsables, ni coupables : impunité de fait

L’ancien premier ministre Laurent Fabius et l'ancienne ministre des affaires sociales Georgina Dufoix ont été relaxés en mars 1999 par la Cour de justice de la République.

La Cour de cassation a mis définitivement fin, mercredi 18 juin 2003, aux poursuites dans l'affaire du sang contaminé, près de vingt ans après le début de la procédure. La plus haute juridiction française a entériné le non-lieu général prononcé le 4 juillet 2002 par la chambre de l'instruction de Paris au bénéfice des trente personnes poursuivies dans le volet "non ministériel" de ce dossier. Outre les quatre condamnés du premier procès, seul l'ex-ministre de la santé Edmond Hervé a été condamné symboliquement en 1999 pour "homicide involontaire", avec dispense de peine.

Les trente suspects étaient d'anciens responsables de la transfusion, d'ex-hauts fonctionnaires, d'anciens conseillers ministériels et des médecins. Parmi eux figuraient Louis Schweitzer, ex-collaborateur de Laurent Fabius à Matignon et actuel président de Renault, et Michel Garretta, ancien patron du Centre national de transfusion sanguine, condamné et incarcéré en 1994. Ils se voyaient reprocher d'avoir provoqué ou favorisé en 1985 la contamination par le virus du sida de plusieurs centaines de personnes, en laissant sciemment en circulation des produits sanguins contaminés ou en les prescrivant. Il était aussi reproché aux conseillers ministériels d'avoir retardé l'autorisation de mise sur le marché du test de dépistage du sida de la société américaine Abbott, dans le but présumé de favoriser la société française Pasteur.

Comme le soutenait le parquet général (c’est à dire en fait l’état), la plus haute juridiction française a estimé que l'affaire ne relevait pas de la justice pénale. Beaucoup de victimes ont été infectées avant la diffusion litigieuse de produits ou la demande d'autorisation d'Abbott, estime la Cour de cassation, et pour les autres victimes "les circonstances n'ont pu être suffisamment déterminées". "Dans l'incertitude sur l'existence d'un lien de causalité entre les fautes reprochées et le dommage, les manquements des responsables des cabinets ministériels, des membres du CNTS et du directeur du Laboratoire national de la santé ne peuvent être incriminés", dit la Cour. Par ailleurs, les médecins "n'avaient pas connaissance du caractère nécessairement mortifère des produits sanguins qu'ils administraient", ajoute la présidente.

La commission d'instruction de la Cour de justice de la République (CJR) a rendu jeudi un non-lieu dans un des volets de l'affaire du sang contaminé pour l'ancien ministre socialiste de la santé, Claude Evin, a-t-on appris, en novembre 2003.
La plus haute juridiction française a estimé qu'il n'existait pas de fondement juridique à la mise en examen des trente médecins, responsables de santé publique et conseillers ministériels poursuivis. L'essentiel de l'affaire est ainsi clos
L'affaire est close, concluant à l'absence générale de faute.

Que pensez-vous de ce jugement ? Normal ? Bien sûr, si vous croyez en la justice. Ils ont tout de même mis vingt ans à l’élaborer. Seul le pauvre professeur Garetta a fait ses quatre années de prison, encore ses collègues médecins ont-ils manifesté pour obtenir sa libération anticipée. Laurent Fabius, lui, premier ministre durant ce scandale, n’a nullement été inquiété. Soyons réjouis : il pourra s’il en est capable, reproduire encore ce genre d’événements, puisque ses amis socialistes n’ont pas été méchants envers lui, au contraire, l’ayant placé président de la chambre des députés, celle précisément appelée à voter les lois aptes à gérer notre beau pays libre portant la belle devise à son fronton : liberté, égalité, fraternité. En effet : liberté de tous les protagonistes de tous les plus graves scandales mettant en jeu la fortune, le travail, la vie des français ; égalité de traitement de leur part puisque aucun ne fut inquiété ; et fraternité de tous les milieux politiques à leur égard, car comme le disait Michel Poniatowski : république de copains et de coquins.

Mais vous, ne vous avisez pas de frauder vos impôts, même de quelques dizaines d’euros, ou de voler à l’étalage, vous seriez immanquablement poursuivi et condamné. Dans notre pays comme dans bien d’autres, il vaut mieux avoir des centaines de morts sur la conscience, non pardon, leur conscience est bien propre (responsables, mais pas coupables… non, finalement : même pas responsables).

L’argent et la politique font très bon ménage, c’est même l’un des principaux moteurs de la seconde. Accéder à un bon rôle hiérarchique français, c’est permettre à ses petits copains de procéder à tous leurs petits trafics, et tout d’abord de bien les placer sur l’échiquier politique. Evidemment, tout ceci ne se fait pas de manière philanthropique. D’ailleurs, il faut bien remarquer, qu’à l’exception de certaines brebis galeuses heureusement rares, les hommes et femmes politiques bien placés ont en général un patrimoine et un niveau de vie confortables. Où ont-ils acquis leur argent ? Mon Dieu, douteriez-vous de leur honnêteté ? Non bien sûr, alors aucune vérification ne se fait. Certes, depuis quelques années, ils se doivent, avant d’entrer au gouvernement, de faire une déclaration de patrimoine, mais les comptes Suisse ou d’autres paradis fiscaux ne sont pas faits pour les clochards ou les SDF (sans domicile fixe). Quant aux brebis galeuses, c’est à dire les politiques honnêtes, même s’ils apparaissent comme des martiens pour leurs pairs, ils ne sont pas très gênants, sachant pertinemment que s’ils s’aventurent à dénoncer la corruption ambiante, ils signent leur mort politique immédiate. Cela signifie qu’en fait parler de politicien ou politicienne honnête est une parfaite aberration, puisqu’ils sont obligés de ne rien dire, tout en sachant ; seuls contre tous, ils vont leur bout de chemin, certainement sans grandes illusions.

C’est pourquoi tous les grands scandales sont rapidement étouffés, quitte à aller chercher par hélicoptère le magistrat qui signera l’écartement d’un juge désirant instruire une affaire politique jusqu’à son terme, le pauvre fou. Evidemment, c’était un peu voyant, le mieux étant de placer à l’avance tous ses pions humains pour éviter que cela ne se produise, écarter tous les gêneurs potentiels, par droit divin politique. Ainsi seront écartés les Eva Joly, Renaud Van Ruymbecque et autres Thierry Halphen qui, d’eux mêmes, dégoûtés, souvent menacés, sans aucun moyen matériel réel pour suivre leurs affaires, partiront de la sphère judiciaire, laissant libres toutes les crapules ne désirant, sous leur discours d’intérêt général, que protéger et faire fructifier leurs intérêts privés. Et sans aucune pudeur, on pourra assister au discours de notre nouveau président Jacques Chirac annonçant la prochaine zéro impunité promise aux petits malfrats, lui qui refusa de se rendre à la convocation d’un petit juge ayant découvert le haut de l’iceberg de toutes ses malversations qu’il eut notamment en tant que maire de Paris.

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