20/11/2006

L’argent seul ne peut rendre heureux, son excès tout aussi peu

Avez-vous la dernière voiture, vêtement, téléviseur, gadget à la mode ? Non ? Que vous êtes pitoyable ! C’est triste pour vous, vraiment. Vous êtes un has been, ou peut être n’avez-vous tout simplement jamais été. Vous allez être l’objet de la moquerie (vous n’êtes pas dans le coup), médisance (vous n’avez pas d’argent), rejet (vous êtes nul).

En plus, vous ne participez pas au fonctionnement de la société, au circuit incessant de l’argent, qui veut que seule la consommation peut sauver l’économie, que toute thésaurisation est synonyme de stagnation sociale. Cela se peut, mais n’oblige pas à faire fonctionner le commerce sur du vent : produits de luxe extrêmement chers, inutiles, bas de gamme programmés dès leur conception en bureau d’étude pour casser rapidement, produits suivant des modes faits pour ne durer que le temps d’une saison…

Notre société est basée sur l'argent. C'est normal, c'est une société capitaliste, et libérale de surcroît. C'est à dire que l'argent, avec quelques bémols, peut se produire n'importe comment, et c'est le but de la société. D'ailleurs, société, cela veut dire aussi : entreprise, c'est tout dire.

Quelques hurluberlus, génération dérivée de celle soixante huitarde, militent au sein du mouvement dit alternatif, anti mondialiste. Ils ont bien peu de chance d'arriver à grand chose. Les anciens de mai 68 sont pour beaucoup aux rênes florissantes de l'ancienne société qu'ils vomissaient. Les communistes français, les premiers, avaient compris toute l'inanité et la dangerosité de leur mouvement et les avaient renié très rapidement.
Les premières réactions gouvernementales contre le mouvement pacifiste des alter mondialistes fut la répression, comme en Italie au sommet de Gênes, honte de Berlusconi.

La seule philosophie, si on peut l’appeler ainsi, restante dans le monde de viable pour gérer un pays est celle capitaliste, qui prône l'argent comme seule véritable avancée sociale, stimulant individuel. Tout se traduit en argent : logement, nourriture, plaisirs, à tel point qu'une promenade gratuite dans un bois apparaît à plus d'un jeune ou même adulte comme ringarde et inutile. Par contre, se presser à trois personnes au mètre carré dans une salle sombre de discothèque enfumée de tabac, bruits stridents et lumières aveuglantes leur semble un grand plaisir.

L'étonnant est de constater l'évolution de la société dans ses différentes composantes depuis des siècles, millénaires, voire millions d'années. Ce qui est flagrant est la considérable différence entre les progrès technique, scientifique, économique d'une part, et philosophique d'autre part. On le sait, on le voit tous les jours, ou plus exactement, on ne s'en aperçoit même plus, au moins dans les pays dits nantis, riches.

Prendre une voiture paraît tout à fait banal. Certes, on ne va pas s'extasier à chaque fois qu'on allume son moteur, mais tout de même. Durant des millions d'années l'être humain n'avait que ses pieds pour avancer, à la rigueur l'aide d'un animal, et là, un esclave mécanique prêt à partir à la moindre sollicitation, par tous les climats, à chaque seconde, emportant un poids de bagages étonnant à une vitesse stupéfiante, pour un coût très faible, un entretien presque inexistant, se gardant très longtemps. Comment ne pas rêver à une telle évocation, croire à son bonheur, à sa chance de vivre pareille aventure quotidienne.

Cet exemple peut être repris pour la moindre de nos occupations quotidiennes, comme tourner un robinet d'eau, écrire avec un stylo sur un papier, rentrer dans son appartement. Mais non, l'habitude allant, le bien ou le fantastique d'hier font parfois l'horreur d'aujourd'hui. Les premiers logements collectifs avec eau courante, proposés à prix modique étaient le maximum de ce que les classes populaires pouvaient alors réclamer, ou même rêver, et leurs occupants se considéraient comme particulièrement chanceux et heureux d'y être. Maintenant, on les appelle des barres de béton, et ce sont les symboles mêmes de la pauvreté et misère banlieusarde, revendication de son mal être.

Il ne s'agit pas ici de vouloir cesser de progresser dans l'élévation de son niveau de vie, mais de s'arrêter un moment, de temps en temps, et considérer la formidable évolution historique et préhistorique du vécu collectif, de constater son bonheur simple et réel, jamais existant depuis des millions d'années.

La progression est fulgurante et suit une courbe exponentielle en ce qui concerne les progrès médicaux, économiques, techniques, scientifiques. C'est à dire qu'avec le temps, si on se retourne en arrière, ce qui s'est précédemment réalisé en cent ans ne prendra que dix ans, puis ce qui a pris dix ans n'en prendra qu'un. Le meilleur exemple en est l'informatique. Le premier ordinateur prenait deux pièces entières, bourré de lampes claquant les unes après les autres, prenant une énergie électrique considérable, et ne sachant guère mieux qu'effectuer les quatre opérations de base arithmétique comme résultats.

Depuis, la fameuse loi de Moore, empirique, veut que tous les ans, la capacité des micro processeurs, c'est à dire le cœur de l'informatique, double en nombre pour une même surface. Et c'est ce qui se passe globalement. Imaginez : c'est comme si chaque année vous doubliez vos revenus. En fait, en très peu d'années, à ce rythme là, tout l'argent produit par la terre entière ne serait pas suffisant pour vous rémunérer ! Si vous ne me croyez pas, faites en le calcul : si l'année 1 vous gagnez 10.000 euros, l'année 2 vous en aurez 20.000, l'année 3 : 40.000, l'année 4 : 80.000, l'année 5 : 160.000, l'année 6 : 320.000, l'année 7 : 640.000, l'année 8 : 1.280.000, l'année 9 : 2.560.000, l'année 10 : 5.120.000, l'année 11 : 10.240.000, l'année 12 : 20.480.000, l'année 13 : 40.560.000, et ainsi de suite, jusqu'à ce que très vite on ne puisse plus vous payer.

Cela montre amplement l'évolution vertigineuse de la science. Lorsqu'enfant, on me disait dans mes illustrés qu'on irait dans la lune, je pensais à une plaisanterie ; actuellement, lorsqu'on me décrit les nanotechnologies, c'est à dire la possibilité de créer des instruments à l'échelle moléculaire, j'ai presque la même sensation. La possibilité de remanier le capital génétique humain, y compris sur un être vivant est fantastique. Et beaucoup de domaines sont tout aussi quasiment incroyables.

Face à ces révolutions qui sont devenues permanentes, regardons le quotidien de bien des humains. La différence de perception n'en est que plus criante, insoutenable. Il n'est nul besoin pour cela d'aller dans les pays pauvres, il suffit de se promener dehors, dans pratiquement n'importe quelle ville française pour apercevoir des êtres guère moins bien habillés que nous, faits comme nous, mais qui dorment dehors souvent, parfois à l'abri de cartons, au mieux de sacs de couchage crasseux ; souvent porteurs de maladies de peau notamment, boutons, plaies, ou traces de coups, car la vie au grand air est violente, pleine de haine des autres, par les autres, mais la haine plus terrifiante est encore celle de soi même.

Indifférents, habitués, craintifs ou résignés, les cohortes de leurs frères humains, frères en tant que race, mais c'est bien tout, passent à coté d'eux, le plus souvent sans les voir. Voici la belle évolution et révolution humaine. Alors que dire, que faire. Doit-on remarquer que voici quelques siècles 99 % des hommes vivaient dans la boue, le froid, la maladie, la peur et la faim, ou doit-on se dire que maintenant que la nourriture est jetée à profusion dans les poubelles de la plupart des foyers, voire sciemment pour que les prix ne baissent pas, on ne peut supporter que des gens aient faim, froid, soient malades, rejetés…

Honte d'être un homme, honte de vivre à coté, honte de ne rien faire. Et vous ?
Certes, la honte n'empêche pas de vivre, ni les autres de mourir, plus ou moins lentement, plus ou moins lentement et atrocement.

1 commentaire:

pinch a dit…

La nanotechnologie remets entièrement en cause le monde économique que nous connaissons...
"Designons ensemble le monde nano de demain..."